Le président russe, Vladimir Poutine, entouré de dirigeants africains lors du précédent sommet Russie-Afrique, à Sotchi, en octobre 2019. POOL / REUTERS Combien seront-ils sur la photo de famille ? A l’heure où la concurrence entre Occidentaux et Russes se fait de plus en plus aiguisée, notamment en Afrique, la venue ou non des chefs d’Etat du continent à Saint-Pétersbourg, les 27 et 28 juillet, a été jusqu’à la dernière minute l’objet de pressions et de négociations de la part de chacun des deux camps. Lire aussi : La Russie remplacera les céréales ukrainiennes à destination de l’Afrique, assure Vladimir Poutine Un an et demi après le déclenchement de la guerre en Ukraine et un mois seulement après la rébellion du groupe paramilitaire russe Wagner, leur nombre est un enjeu symbolique et diplomatique majeur pour Vladimir Poutine. « Nous allons signer un paquet important d’accords et de mémorandums intergouvernementaux et interministériels avec des Etats et des associations régionales du continent », a-t-il promis dans un communiqué daté du lundi 24 juillet, avant d’annoncer que serait approuvé, à l’issue de ce sommet, le « plan d’action » dessinant les contours du « partenariat Russie-Afrique à l’horizon 2026 ». En 2019, alors que Moscou entendait sonner son grand retour sur en Afrique avec son premier sommet Russie-Afrique, 45 chefs d’Etat et de gouvernement avaient fait le déplacement à Sotchi. Cette année, aucun chiffre n’a été annoncé par le Kremlin. Selon les informations du Monde, au moins six chefs d’Etat ont déjà confirmé leur participation au sommet, ainsi que Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’Union africaine (UA). Négociations sécuritaires et économiques L’Egyptien Abdel Fattah Al-Sissi, qui avait coprésidé la réunion de Sotchi il y a cinq ans, a prévu de faire le déplacement, tout comme le Sud-Africain Cyril Ramaphosa, dont le parti est un allié de longue date de Moscou. Macky Sall, le président du Sénégal, qui s’était abstenu lors des votes sur l’agression russe sur l’Ukraine aux Nations unies au début de l’offensive, a confirmé sa présence. Sans surprise, les principaux alliés de Moscou sont également annoncés à Saint-Pétersbourg : le Centrafricain Faustin-Archange Touadéra et le Malien Assimi Goïta, qui font tous les deux appel aux paramilitaires du Groupe Wagner. Si sa présence est confirmée, ce serait le tout premier déplacement du colonel malien hors du continent depuis le putsch d’août 2020. Le capitaine burkinabé Ibrahim Traoré suivra-t-il son voisin ? C’est ce qu’annonce Ouagadougou. Le voyage de son premier ministre à Moscou, grâce à une entremise malienne, en décembre, avait été abondamment commenté, même si Ouagadougou semble pour l’instant décidé à ne pas faire appel aux mercenaires russes. Une forte délégation d’opérateurs économiques burkinabés est en tout cas annoncée. Lire aussi : Article réservé à nos abonnés L’intenable proximité sud-africaine avec la Russie Le général soudanais Al-Bourhane, en guerre avec les forces du général Hemetti, ne quittera pas Khartoum. Mais le pays, qui n’a cessé de raffermir ses relations avec la Russie – laquelle souhaite construire une base navale sur la mer Rouge –, va envoyer le vice-président du Conseil souverain, ainsi qu’au moins quatre ministres. D’autres Etats, tels que l’Algérie ou la Mauritanie, ont préféré être représentés par leur premier ministre. Au-delà de l’enjeu symbolique, la présence de responsables africains à Saint-Pétersbourg pourra s’avérer cruciale dans les négociations sécuritaires (Wagner est en train de redimensionner sa présence dans certains pays comme la Centrafrique, où des centaines de combattants ont quitté le pays ces dernières semaines) et économiques, notamment autour des livraisons de céréales. Service partenaire Cours d’anglais en ligne avec Gymglish Apprenez l’anglais en 10 minutes par jour avec des leçons ludiques et personnalisées Découvrir « Les sociétés russes sont intéressées pour intensifier leur travail sur le continent dans le secteur high-tech, l’exploration géologique, le secteur énergétique, y compris l’énergie nucléaire, l’industrie chimique, l’exploitation minière, l’ingénierie des transports, l’agriculture et la pêche », a souligné Vladimir Poutine dans son communiqué lundi. Plus de 2 600 chefs d’entreprise invités Des centaines d’opérateurs économiques, d’hommes politiques, de membres de la société civile et de journalistes – mais aucun du Monde, les journalistes issus de pays « non-amicaux » n’ayant pas été accrédités, comme l’avait annoncé le porte-parole de la présidence russe en juin – sont également attendus en marge du sommet politique. Selon une liste officieuse établie par Moscou mi-juillet et qui a fuité, 2 645 chefs d’entreprise africains et occidentaux ont été invités, sans pour autant qu’il soit dit que tous seront présents. Ces noms ont été diffusés le 18 juillet sur le site ukrainien InformNapalm par les hackers de Cyber résistance pour, disent-ils, donner « une dernière chance » à « certains invités étrangers, qui envisagent toujours d’assister à cet événement douteux, de prendre la bonne décision et d’annuler leur visite ». Ce collectif a déjà fait parler de lui en avril après avoir affirmé être à l’origine du piratage des e-mails d’un espion militaire russe recherché par le FBI pour avoir participé au hacking des emails de la campagne d’Hillary Clinton, avant la présidentielle de 2016. Lire aussi : Emmanuel Macron accuse la Russie d’être une « puissance de déstabilisation de l’Afrique » Cette liste officieuse rassemble aussi bien des personnalités ayant garanti leur présence au sommet que des individus conviés mais qui n’ont pas confirmé leur participation, comme l’ont expliqué certains d’entre eux, contactés par Le Monde. « Un Sénégalais et une Russe n’ont pas arrêté de m’appeler, insistant pour que j’accepte de venir, mais à mes propres frais, sans que ne soient payés ni l’hôtel, ni le billet d’avion. Il n’y a même pas de per diem. J’ai finalement décliné l’invitation », rapporte avec amertume un Sénégalais préférant rester anonyme. Certains pays semblent quant à eux s’échiner à montrer leur indifférence face à ce sommet. Au Bénin, l’entourage du président Patrice Talon précise ainsi ne disposer d’« aucune information concernant l’envoi d’une délégation ». La Côte d’Ivoire, autre allié majeur de Paris en Afrique de l’Ouest, se contentera quant à elle d’une présence a minima : seul son chargé d’affaires en Russie sera à Saint-Petersbourg. Selon un proche du président Alassane Ouattara, ce dernier n’a d’ailleurs pas manqué de rappeler, le 13 juillet, à Yurii Pyvovarov, l’ambassadeur d’Ukraine venu lui présenter ses lettres de créance, que « la Côte d’Ivoire se tenait à ses côtés ». Morgane Le Cam
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