un nouveau plan de l’ONU à l’épreuve des rivalités



Abdoulaye Bathily, le chef de la Mission d’appui des Nations unies en Libye (Manul), à Tripoli, le 5 novembre 2022. MAHMUD TURKIA / AFP Le camp de l’est l’a rejeté, celui de l’ouest dit le soutenir et les positions de leurs parrains étrangers restent éloignées : à peine annoncé, le nouveau plan de l’ONU pour organiser des élections en Libye se heurte aux rivalités qui minent le pays. Si celui-ci connaît une relative accalmie ces derniers mois après une longue période d’insécurité, de violences fratricides et de divisions sociales, le chaos institutionnel étouffe l’espoir de le voir se stabiliser. A la tête de la Mission d’appui des Nations unies en Libye (Manul) depuis octobre, le Sénégalais Abdoulaye Bathily a annoncé devant le Conseil de sécurité, le 27 février, le lancement d’une initiative censée permettre « la tenue d’élections présidentielle et législatives en 2023 ». Le diplomate a provoqué l’ire des acteurs politiques libyens en déplorant l’incapacité du Parlement, divisé en deux chambres rivales, à « se mettre d’accord » pour l’organisation de ces scrutins, initialement prévus en décembre 2021 mais reportés sine die en raison de divergences persistantes. Depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi, en 2011, dans le sillage des « printemps arabes », la Libye est déstabilisée par les divisions entre l’ouest et l’est du pays, chaque camp bénéficiant de l’appui de puissances étrangères elles-mêmes rivales, Etats-Unis et Russie en tête. Deux gouvernements se disputent le pouvoir, l’un installé à Tripoli (ouest) et reconnu par l’ONU, l’autre à Syrte (centre), soutenu par l’homme fort de l’est libyen, le maréchal Khalifa Haftar, les deux camps ayant chacun son bras législatif au sein du Parlement. Lire aussi : L’Union africaine annonce l’organisation d’une conférence de réconciliation nationale sur la Libye La Chambre des représentants, à l’est, et le Haut Conseil d’Etat, qui fait office de Sénat à l’ouest, ont toutefois critiqué à l’unisson le plan de l’émissaire onusien. La position des deux chambres législatives rivales était « prévisible » puisque le plan onusien aura pour conséquence leur disparition avec la tenue d’élections, explique à l’AFP Khaled al-Montasser, professeur en relations internationales à l’université de Tripoli. Selon lui, les deux institutions s’accordent pour considérer l’initiative onusienne « comme une ingérence dans leur pouvoir souverain de décision et une tentative d’imposer une volonté internationale aux Libyens ». A l’issue d’un vote contesté, les deux chambres du Parlement ont adopté in extremis, début février, le « 13e amendement » à la Déclaration constitutionnelle – qui fait office de Constitution provisoire – en le présentant comme un cadre juridique pour la tenue des scrutins. « Dernière chance » Abdallah al-Rayes, un analyste politique libyen, voit dans l’initiative d’Abdoulaye Bathily un moyen de pression pour faire bouger les adversaires libyens en leur donnant « une dernière chance » avant que « les scrutins n’aient lieu sans eux ». « La communauté internationale veut mettre dans l’embarras les deux chambres, passées maîtresses dans l’art de perdre du temps et qui se livrent à de la surenchère politique », dit l’expert à l’AFP. A Tripoli, le gouvernement d’union, dirigé par Abdelhamid Dbeibah, a de son côté affiché sa volonté de coopérer avec le plan de M. Bathily en appelant l’ONU à apporter une aide technique et logistique pour organiser rapidement ces élections. Ses soutiens internationaux ont aussi salué l’initiative onusienne. Les Etats-unis ont « exhorté » les dirigeants libyens à adopter « un état d’esprit constructif », selon un tweet de l’ambassade américaine à Tripoli. Le Royaume-Uni a également appelé à la tenue d’élections « libres et équitables ». « Les conditions pour les élections doivent être acceptées de tous et les résultats respectés », a déclaré dans un tweet la représentation britannique à l’ONU. Lire aussi : En Libye, le géant italien Eni investira 8 milliards de dollars dans le gaz Mais pour Khaled al-Montasser, « le soutien américain et britannique au plan ne suffit pas », car il n’a pas convaincu la Russie, dont les combattants du groupe de mercenaires Wagner sont très présents dans l’est et le sud de la Libye. « Moscou, puissant protagoniste en Libye, exerce toute son influence sur le maréchal Haftar, qui contrôle militairement ces zones », souligne le professeur. Et le gouvernement de Tripoli tient à empêcher sa candidature en interdisant aux militaires et aux binationaux de se présenter, Khalifa Haftar étant américano-libyen. « Il est inacceptable de voir revenir un régime militaire », a récemment fustigé Abdelhamid Dbeibah, douze ans après la chute du dictateur Kadhafi. Le Monde avec AFP



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